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48ème- 54ème jours : BULGARIE

Bonjour les enfants,

c’est votre rentrée des classes- après deux semaines de vacances de la Toussaint- et nous revenons avec quelques nouvelles fraiches de nos dernières pérégrinations. Nous avons visité deux pays dans ce laps de temps, et allons essayer de vous les dépeindre avec nos mots et de vous en donner un aperçu en quelques photos.

Comme vous savez, nous avons décidé qu’il n’était pas prudent de rentrer dans les eaux territoriales turques avec le bateau, étant donné les tensions politiques qui secouent la Turquie en ce moment. Pour vous expliquer la chose simplement, un bateau a besoin de papiers d’identité (comme nous !) et il a besoin de visas pour séjourner dans un pays étranger. Or, ce visa n’est pas simple a obtenir et nous pourrions rester bloquer en Turquie, si par hasard un décret gouvernemental bloquait soudainement le transit.

>> En nous faisant tous petits et en entrant dans le pays par la route, sac au dos, nous risquions beaucoup moins gros. Nous laissons donc FOPADEC’HJ (à regrets) amarré dans le port de KAVALA, et partons vers la frontière Bulgare avec un petit baluchon chacun.

Deux semaines droit devant nous, en direction de l’Orient et de terres qui nous sont totalement inconnues. La Bulgarie ? Une vague idée tirée de nos anciennes leçons de géographie. La Turquie ? Au cœur de l’actualité, beaucoup d’images se bousculent dans nos têtes, mais nous ne savons pas trop à quoi nous en tenir.

Mercredi 12 Octobre

Préparatifs rudimentaires : nous nous préparons à deux semaines de vie ‘rustique’. Sacs de couchage, hamacs, poncho, et quelques affaires chaudes pour affronter le froid des steppes et montagnes Bulgares. Pour la subsistance, Gus nous cuit un pain de 1kg, embarque 3 pommes et quelques conserves de thon. Il tient beaucoup à prendre du thé, bien que nous n’ayons rien pour le chauffer. ‘’C’est social et ça réchauffe, on en distribuera aux gens qu’on rencontrera dans les refuges’’

Première étape, avant de faire du stop et de nous promener librement dans le pays, il faut passer la frontière Bulgare. Nous cherchons un petit bus local. Un départ par jour. Nous quittons Kavala à 16h, arrivée… dans la nuit. « Mais ou exactement ?

- Quelque part dans les montagnes. »

- Treeees bien.

Lâchés au bord de la route à Blageovgrad, un providentiel enchainement de rencontres inopinées, nous fait atterrir dans un autre bus, croulant & grinçant, qui monterait – semble-t-il - vers la ville de Rila.

***Pourquoi mettre le cap sur Rila ? Nous avons repéré, sur le petit guide de Bulgarie dont nous avons hérité du grand-père de Philippe, un monastère orthodoxe qui aurait été fondé par un ermite aux premiers moments de la chretienté, et qui aurait grande réputation dans tous les Balkans. Cap sur le monastère de Rila, donc ***

Nous débarquons dans ce village de montagne en pleine nuit et comprenons après quelques échanges cocasses dans un bulgare (que nous ne maitrisons pas parfaitement bien…) que nous pourrons grimper avec le personnel de la maintenance du monastère. Ils se retrouvent à 7h15 du matin. Nous installons hamacs et tapis de sol pour une courte nuit dans un bois.

Jeudi 13 Novembre

Aux aurores, nous montons donc avec le personnel de maintenance, dans un petit bus qui se jette à l’assaut du massif du Pirrin. Le monastère se trouve dans le creux d’une vallée entourée de sommets enneigés. La route est étroite et sinueuse. Nous ne croisons pas un véhicule. Nous devinons aisément l’isolement dans lequel doit se trouver le monastère quand viennent l’hiver et la neige.

La nuit dehors a été fraiche, Philippe n’a pas fermé l’œil et avait les orteils tout engourdis. Pourtant, en arrivant devant les portes de l’imposante batisse, nous ouvrons des yeux tous ronds, et sommes soudainement tout à fait reveillés.

Un mur d’enceinte sur 3 étages, des pierres immenses et grises, une petite porte richement décorée… nous avons l’impression de pénétrer dans un havre de paix, un ecosystème autosuffisant, qui n’a pas besoin du reste du monde pour tourner. Le soleil baigne tout juste le dôme d’une chapelle qui trône au milieu de la cour. Le batiment est d’une seule tenant. D’immenses galeries bordent la cour interieure. Nous devinons que les appartements, ou petites pioles, des moines se trouvent au deuxième étage. Au rez-de-chaussée, nous découvrons un immense cloitre qui donne sur les pièces de vie courante : cuisine, refectoires, gallerie des icones…

La façade extérieure de la chapelle est couverte de fresques aux couleurs vives. L’iconostase (autrement dit, la paroi qui sépare le cœur et l’assemblée, dans le rite orthodoxe) est finement sculptée. Nous ne savons plus ou y donner des yeux. Un monsieur bedonnant, moustachu, l’air malicieux et sympathique, nous présente la tombe du premier empereur Bulgare et nous parle en quelques mots clés de ce monastère, qui a tenu bon malgré les sursauts de l’histoire.

*Longue marche d’approche dans les forets aux couleurs d’automne, superbes, d’un orange noble, vert clair, beige, marron… Feuillages percés de rayon de soleil et de grandes franges de ciel bleu.

*Comme à notre habitude, lorsque nous marchons, nous méditons et apprenons un texte par cœur. Dans ces montagnes enneigées, nous avons choisi de nous pencher sur la lettre adressée par Hélie de Saint Marc aux jeunes de notre génération.

(Même si vous n’avez pas encore 20 ans, les enfants, je recopie sa lettre ci-dessous car vous pourrez peut-être la relire dans quelques années, elle vous parlera davantage)

« Que dire à un jeune de 20 ans ? »

Quand on a connu tout et le contraire de tout,

quand on a beaucoup vécu et qu’on est au soir de sa vie,

on est tenté de ne rien lui dire,

sachant qu’à chaque génération suffit sa peine,

sachant aussi que la recherche, le doute, les remises en cause

font partie de la noblesse de l’existence.

Pourtant, je ne veux pas me dérober,

et à ce jeune interlocuteur, je répondrai ceci,

en me souvenant de ce qu’écrivait un auteur contemporain :

«Il ne faut pas s’installer dans sa vérité

et vouloir l’asséner comme une certitude,

mais savoir l’offrir en tremblant comme un mystère».

A mon jeune interlocuteur, je dirai donc que nous vivons une période difficile

où les bases de ce qu’on appelait la Morale

et qu’on appelle aujourd’hui l’Ethique,

sont remises constamment en cause,

en particulier dans les domaines du don de la vie,

de la manipulation de la vie,

de l’interruption de la vie.

Dans ces domaines, de terribles questions nous attendent dans les décennies à venir.

Oui, nous vivons une période difficile

où l’individualisme systématique,

le profit à n’importe quel prix,

le matérialisme,

l’emportent sur les forces de l’esprit.

Oui, nous vivons une période difficile

où il est toujours question de droit et jamais de devoir

et où la responsabilité qui est l’once de tout destin, tend à être occultée.

Mais je dirai à mon jeune interlocuteur que malgré tout cela,

il faut croire à la grandeur de l’aventure humaine.

Il faut savoir,

jusqu’au dernier jour,

jusqu’à la dernière heure,

rouler son propre rocher.

La vie est un combat le métier d’homme est un rude métier.

Ceux qui vivent sont ceux qui se battent.

Il faut savoir

que rien n’est sûr,

que rien n’est facile,

que rien n’est donné,

que rien n’est gratuit.

Tout se conquiert, tout se mérite.

Si rien n’est sacrifié, rien n’est obtenu.

Je dirai à mon jeune interlocuteur que pour ma très modeste part,

je crois que la vie est un don de Dieu

et qu’il faut savoir découvrir au-delà de ce qui apparaît comme l’absurdité du monde,

une signification à notre existence.

Je lui dirai qu’il faut savoir trouver à travers les difficultés et les épreuves,

cette générosité,

cette noblesse,

cette miraculeuse et mystérieuse beauté éparse à travers le monde,

qu’il faut savoir découvrir ces étoiles,

qui nous guident où nous sommes plongés au plus profond de la nuit

et le tremblement sacré des choses invisibles.

Je lui dirai que tout homme est une exception,

qu’il a sa propre dignité

et qu’il faut savoir respecter cette dignité.

Je lui dirai

qu’envers et contre tous

il faut croire à son pays et en son avenir.

Enfin, je lui dirai que de toutes les vertus, la plus importante,

parce qu’elle est la motrice de toutes les autres

et qu’elle est nécessaire à l’exercice des autres,

de toutes les vertus, la plus importante me paraît être le courage, les courages,

et surtout celui dont on ne parle pas

et qui consiste à être fidèle à ses rêves de jeunesse.

Et pratiquer ce courage, ces courages,

c’est peut-être cela

«L’Honneur de Vivre»

Hélie de Saint Marc

*Reserve de petit bois car nous ne savons toujours pas ce que nous trouverons en haut… mais à la vue des pics enneigés, nous supposons qu’il va faire froid. Les sommets dépassent tous 2500m… il n’y aura pas d’arbres et par conséquent peu de bois a bruler. Nous chargeons nos sacs encore un peu.

*Rencontre de trois espagnols au détour d’une petite bergerie. Un groupe de trois amis marcheurs, la quarantaine, qui se retrouvent tous les ans pour une rando d’une dizaine de jours. Cette année ils ont choisi de traverser les deux massifs les plus élevés de Bulgarie. Le Vihren et le Pirrin. Nous les croiserons plusieurs fois dans les jours qui suivirent.

*Les sommets se font plus escarpés, les crêtes sont battues par le vent, et nous sortons des sous-bois. Nous découvrons de grandes étendues de neige immaculée et nos chaussures s’enfoncent d’une vingtaine de centimètres.

*Sous-équipés pour passer des heures dans la neige, nos petites chaussures de trail prennent rapidement l’eau. Pourtant, nous passerons près de 24h au dessus de 2500m, dans la neige.

*Nous marchons tout droit, en suivant de vagues marques de couleur sur les rochers qui dépassent de la neige. Le soleil est plus brillant que jamais. Ses rayons se reflètent sur la neige qui nous entoure à 360° et nous aveugle. C’est le bonheur. Nous traversons des petits ruisseaux qui coulent délicatement sous des plaques de neige, contournons des lagons entièrement gelés. Nous continuons tout droit, nous fiant uniquement à la providence pour trouver un abri. En effet, il fait sec et le froid nous prend au corps. Il fallait que nous trouvions un toit, autrement, nous aurions été changé en petits glaçons pendant la nuit!

*Lorsque le jour commence à baisser, nous apercevons une cheminée fumante. Et nous frappons à la porte au moment même ou le soleil disparaît derrière les crêtes.

*Ce petit refuge nordique est constitué d’une salle principale en pierre (avec un poêle à bois !!) et de petites « boites colorées » dans laquelle on peut établir domicile.

*Nous y retrouvons les espagnols qui déjà se répandent en embrassades et cris de bienvenue, puis nous voyons apparaître une quinzaine d’autres randonneurs comme par enchantement. Ils arrivent au compte goute, transis. Ils ont tous fait la même expérience que nous. Ils ont aperçu cette cheminée fumante qui leur annonçait un bon bol de soupe et un salon où faire sécher leurs chaussures. Nous faisons de belles rencontres : plusieurs couples d’israéliens mais aussi Vantzi & Jeanette en tout premier lieu. Ces derniers sont les gestionnaires du refuge. Ils habitent dans cette montagne à l’année depuis 24ans.

Vantzi est un sacré numéro. 120kg environ, bâti comme un bucheron canadien, son visage souriant est encadré d’une barbe touffue. Il est docteur en philosophie et aurait enseigné dans le temps. Il n’a pas vraiment décidé quelles étaient ses convictions profondes alors il pioche un peu partout dans le bouddhisme, le christianisme, l’islam et l’hindouisme. Comme en témoigne la décoration de son refuge (et de sa maison, qui ne font qu’un) il a souvent voyagé en Inde pour écouter des « maitres » parler de transcendance.

Une piste inopinée nous permettra d’engager la discussion : il est un fervent admirateur de St Augustin.

De fil en aiguille, la discussion s’oriente sur notre prochaine destination. « Où pensez-vous aller, une fois descendus de cette montagne ? » - Eh bien, à Sofia, pourquoi pas ?

>> Vantzi nous propose, comme si ce fut la chose la plus normale du monde, de nous confier les clés de sa maison à Sofia.

Vendredi 14 Novembre

Levés aux aurores, nous quittons le refuge avec nos amis espagnols, et attaquons un chemin vertical qui part juste derrière les baraquements. Nous avons appris que le joyau de ce massif montagneux du Pirrin était « le Plateau des Sept Lacs », et décidons naturellement d’y faire un tour. Il faudra longer une crete qui s’étend d’Ouest en Est, jusqu’au pic de Musala. Petit détail : elle est entièrement enneigée et le vent a crée des croutes de glaces et des combes vertigineuses. Lorsque nos amis espagnols sortent leurs crampons pour glaciers, ils s’inquiètent de nous voir continuer en petites chaussures transparentes. N’ayant rien d’autre, il va bien falloir passer tel quel. Nous avons toujours nos sacs pour les deux semaines de nomade sur le dos.

Comme nous marchons un peu plus vite qu’eux, et que nous devons prendre un peu d’avance au cas où la traversée des combes se reveleraient difficile… nous partons en tête.

S’ensuit une heure de glissades et de marche à tatons. Nous plantons parfois nos couteaux dans la glace pour se stabiliser. Nos opinels deviennent piolets de fortune… et nous passons !

La vue est sublime sur le haut de combe, dominant les lacs : névés, lacs et plaines verdoyantes se melent dans un panorama en plusieurs plans successifs. Notre regard porte à des kilometres.

La descente se fait au pas de course, pour tacher d’atteindre le monastère de Rila, avant le dernier bus qui partirait, semble-t-il, vers 15h. Nous sommes bien loin et nous retrouvons à courir sur la neige, en chantant pour battre la cadence. La crête que nous continuons de suivre domine le monastère qui apparaît au milieu des couleurs d’automne, dans toute sa grandeur.

Arrivés à Sofia, nous rencontrons une dénommée Koprinka, dont nous avons eu le contact par Vantzi, qui nous ouvre les portes de notre nouveau « chez-nous » proche du centre ville.

La maison citadine de Vantzi & Jeanette, est à l’image de leur refuge des montagnes. Nous pénétrons dans un appartement trois pièces, dont l’aménagement est plus proche du palais oriental que de l’habitat traditionnel bulgare. Une bibliothèque débordante. Une salle de bains n’ayant pas de porte, mais plutôt une entrée massive aux montants couleur ocre, affublée de lustres diffusant une lumière tamisée. Des guitares, luths, flutes et autres instruments moyenâgeux. Pas de table mais quelques poufs en cuir. Pas de lit mais un empilement de couvertures et une paillasse au sol. « Faites comme chez vous »

Samedi 15 Novembre

Nous décidons de rester une nuit de plus pour pouvor dédier une journée complete a la visite de Sofia. Nous quittons la maison hippie-indienno-Bulgare de bon matin, pour ne rentrer qu’a 23h.

À Sofia, nous allons de surprise en surprise, de rencontres en rencontres, qui nous mènent inévitablement de bons-plans en bons-plans. Sans interruption, nous découvrons la ville au gré de la providence. La rencontre d’un metteur de scène & grande amateur de théâtre, nous mène à une visite historique FREE CITY GREEN TOUR où l’accent est mis sur les deux grandes périodes non-bulgares qu’a connu le pays : la domination ottomane et période communiste.

La participation à un jeu concours où l’on nous demande de faire des pitreries, nous conduit à une ‘’découverte gratuite de la gastronomie des balkans’’. Nous ne comprenons pas tres bien le modele économique de ce guide touristique, mais toujours est-il que l’on nous propose de manger gratis dans 5 restaurants différents pendant près de 3h. Alors, quand on nous parle sur ce ton… on ne sait pas refuser ! Et en effet, sans entourloupes, la guide nous mène fait découvrir la soupe de yaourt aux concombres, les pates feuilletées traditionnelles, les spécialités pâtissières et les apéritifs. Culture gastronomique riche, qui gagne à etre connue.

Un marché au puces, où nous trouvons tellement de tout, que l’on découvre sur plusieurs étalages, toute une panoplie d’accessoires appartenant à des officiers Nazis et des décorations militaires datant de l’ère stalinienne. Pour de petits français comme nous, cela fait tout de même bizarre de se retrouver devant des « pièces de collection » : jumelles, fioles, briquets, boussoles … floquées de la croix gammée.

Les églises sont magnifiques. Sainte Sofie, qui a donné son nom à la ville est une basilique qui a plus de 1000 ans, faites de briques, dont le clocher a été détruit il y a plusieurs siècles. La cloche est accrochée en haut d’un arbre depuis lors.

Pour terminer la visite de cette ville en beauté, nous passons devant l’Opéra, où est donné pour le soir même « Petrouchka & l’oiseau de feu », un ballet de Stravinski

Nous prenons les billets une demie heure avant le début du spectacle et prenons place sur les beaux fauteuils en velours, habillés comme des gueux. Les amateurs de ballet, très distingués, nous dévisagent, mais acceptent discuter à l’entracte en apprenant que nous sommes français. Orchestre enivrant et danseurs gracieux, nous goutons avec bonheur à la culture russophone.

Dimanche 16 Novembre :

Baignant dans le monde orthodoxe depuis plusieurs semaines deja, nous sommes à la fois surpris et ravis de trouver une paroisse catholique en l’église St Joseph.

Apres une belle messe nous rencontrons plusieurs personnes vraiment sympa, entre autres un Nigérian et un Congolais, qui habitent en Bulgarie depuis de longues année. Ils nous recommandent la ville de Plovdiv.

Suivant leur conseil et le principe d'improvisation continue, nous partons immédiatement , en stop, direction Plovdiv (ou Philippopolis pour les grecs, nostalgiques)

Les routes Bulgares ont cela d’intéressant qu’elles deviennent autoroutes avant même d’être sorties de la ville. Plusieurs stratégies pour faire ralentir les voitures :

*Nous nous installons à un feu et appuyons sans cesse sur le bouton du passage piéton pour arrêter les automobilistes et pouvoir discuter (deux mots) avec eux

*Nous campons, devant le poste de police. En général, les gens lèvent le pied en passant devant…

*Finalement, c’est sur le parking d’un bon restaurant de routiers que nous parvenons à capter l’attention des bulgares de passage.

Nous varierons les techniques au cours de nos différents tentatives de stop en Bulgarie.

Pour l’heure, c’est un homme d’une quarantaine d’années, nostalgique du régime stalinien et de la Bulgarie soviétique, qui nous conduit à Plovdiv ! Il nous dépose en plein centre, proche de la paroisse catholique que l’on nous a recommandée. Le prêtre qui nous accueille nous parle de Plovdiv, nous fait savoir que la ville est en fête depuis plusieurs jours (car elle a été élue capitale de la culture 2019) puis nous propose une petite salle de classe pour passer la nuit.

Nous allons faire un tour dans le centre historique et découvrons au gré des rues piétonnes, une multitude de scènes montées en plein-air, sur lesquels les groupes les plus variés donnent de la voix. Sur des airs variant du hard-rock au reggae, voire aux sonorités bulgaro-balkaniques, nous découvrons plusieurs expositions, des éclairages nocturnes qui mettent en valeur de belles façades du XIXème, et des petits marchés. Comme à notre habitude, nous discutons avec tous ceux qui exposent leur savoir-faire.

Un certain producteur de vin, qui s’est formé dans les exploitations françaises pendant près de 8 ans, nous propose de visiter son domaine viticole. Il nous donne rendez-vous le lendemain dans le début d’après midi. Il pourra venir nous chercher en voiture, nous amener à 30km de là, et nous déposer là où cela nous arrange après. Comment refuser ?

Lundi 17 Novembre :

Réveillés aux aurores, nous plions bagages et attendons le prêtre qui nous a donné RDV à 7h. À l’heure précise, il entre dans notre salle de classe, et nous apporte des cafés dans des gobelets en plastique et quelques biscuits. Nous sommes aux anges !

La discussion se poursuit en italien (car, comme beaucoup de slaves, il a étudié pendant tout son séminaire à Rome et parle couramment italien). Nous lui proposons de servir la messe qu’il célèbre à 8h.

Il célèbre tous les matins pour trois petites vieilles et la proposition lui plait : ça le change bien de son ordinaire ! Ayant reçu une aube chacun dans la sacristie, nous prenons place dans le chœur. La messe est en Bulgare mais nous suivons l’ordre approximatif. Les vieilles dames sont ravies de voir une telle jeunesse, une telle vie…! Dans la matinée, le prêtre nous invite à l’accompagner dans son ministère et nous présente l’évêque qui passait justement pas là…

Bref, si le cœur nous en dit, il y a toujours une place pour nous au séminaire de Plovdiv !

Ensuite, pour bien faire les choses, et honorer cette ville ‘’patrimoine mondial 2019’’, nous décidons de visiter tous les musées. Non pas, une partie ou quelques musées, mais bien tous le musées.

Nous prenons un pass’ qui donne accès à tout un panel de ruines romaines, de maisons d’époque & de galleries d’art. Le circus maximus, qui a été sorti de terre récemment est présenté par un film 3D très bien fait. Plusieurs petits commerces ont été réaménagés comme au XIXème. Nous entrons ainsi dans une pharmacie aux grandes vitrines pleines de fioles, de potions et de grimoires.

Pris en stop par des Kurdes (réfugiés en Bulgarie mais préparant l’avènement du Kurdistan libre) nous sortons de la ville et rejoignons notre ami de la veille, le viticulteur.

Il nous fait entrer dans ses ateliers, dans ses caves, et nous explique tout le processus de fabrication du vin. Il nous propose ensuite une dégustation des ‘’jus de raisin’’ après 1ere et deuxième fermentation. Il s’attarde ici sur la robe, la couleur… et nous fait sentir la différence entre les cépages français plantés en Bulgarie et les cépages français plantés ailleurs. ‘’Le vin Bulgare est exquis, mais malheuresement, trop peu connu… c’est à cause du régime communiste tout ca…’’

Les Bulgares n’accordent pas tous le même amour à l’URSS.

Il produit (tout de même !) 500.000 bouteilles/an.

Apres cette halte gastronomique et culturelle, nous reprenons la route, en auto-stop… direction les montagnes. Nous avons bel et bien quitté les massifs de Vihren et du Pirrin – qui s’étendaient au sud de Sofia- et entrons maintenant dans le Massif du Rhodope.

Dominant les plaines de Thrace, le Rhodope est un massif qui compte plusieurs stations de ski… davantage fréquentées par les russes fortunés que par les Bulgares à leur grand regret.

Notre objectif est de rejoindre le monastère de Batchkovo, dont on nous a vanté les merveilles picturales et le cadre.

Notre ami viticulteur nous dépose sur un ‘’grand axe routier’’ à la tombée de la nuit et… ‘’ bon courage les copains’’!

Avec nos tetes patibulaires, hirsutes, il est difficile d’inspirer confiance à un automobiliste… surtout quand il fait noir.

Pourtant : une, deux puis trois voitures nous font faire des petits sauts de puce qui nous approchent de la montagne. Au pied de la Forteresse de*** un vieux monsieur, qui s’enthousiasmait de tout ce qu’il voyait, nous emmène. À chaque virage, nous avons droit à un « 3, 2, 1 et… tataaaaaa »

À 20h, nous sommes devant les portes du monastère.

Le gardien des cellules pour visiteurs est parti ? Nous aurions pu dormir dans un petit lit au chaud près de l’âtre, mais il est parti 10 minutes plus tôt que d’habitude aujourd’hui ?

Qu’a cela ne tienne ! Nous dormirons dehors, à coté des toilettes, sous un abri précaire, hamac et tapis de sol, bonnet sur les oreilles… comme des chicanos !

Mardi 18 Novembre

Le monastère est superbe, nous ne sommes pas déçus d’avoir fait un trajet auto-stop nocturne et une nuit dehors par -2°C. (Eh oui, il fait froid dehors dans ces montagnes quand même).

Une grande marmite chauffe sur un feu de bois au milieu de la cour. Une sorte de mousse épaisse en déborde. Une vieille dame surveille.

C’est ainsi que l’on colore la laine de mouton ! Mélangée avec quelques légumes bien choisis, la laine chauffe pendant plusieurs heures dans ce genre de chaudron et, petit à petit, intègre la couleur du légume dans ses fibres.

Apres la visite, nous obliquons vers les sommets aux superbes couleurs de printemps. De sources, en vieilles bâtisses puis en cabanes d’ermites, nous arpentons cette montagne qui sent bon et dont le calme inébranlable est saisissant.

Direction la Mer Noire ! Une fois que nous avons décidé de passer la seconde et de foncer vers cet objectif tant rêvé, plus rien de nous arrete.

Nous descendons la montagne au pas de course, retour Plovdiv, bifurcation vers Burgas, arrivée à NESSEBAR vers 22h.

Au bord de cette Mer sombre et inconnue, nous respirons l’air iodé, chargé de sel marin… et réalisons que FOPADEC’H nous manque déjà. Nous savons qu’il nous attend sagement à Kavala, en Grèce, mais petite nostalgie tout de même !

En réalité, nous avons débarqué à 5km de Nessebar, dans une zone hautement touristique appelée SUNNY BEACH. Si si, le coté de commercial de l’endroit se reflète même dans le nom que les promoteurs immobiliers ont choisi.

Cette longue plage, dont l’extrémité est dominée par la presqu’ile de Nessebar, est envahie de grands complexes hoteliers.

Le Imperial Resort est en travaux. Un bon matelas ne serait pas de refus. Alors au terme d’une petite escalade et de trois pirouettes, nous nous retrouvons dans une chambre a moitié aménagée, et passons une nuit de reve.

Mercredi 19 Octobre

Nessebar est une ile à part. 27 eglises paléochretiennes, du Vème siecle ou du XVIIème. L’Histoire du lieu est si riche que nous voudrions y passer plusieurs jours. Le guide illustré dont nous avons hérité du grand-pere de Philippe nous permet de ne rien manquer de la richesse de cet endroit qui a été successivement Thrace, Romain, Bulgare, Soviétique, Turc…

Apres un déjeuner proprement Bulgare dans une petit échoppe de la presqu’ile, fait de viandes délicieuses, de soupe de haricots et autres mets bien consistants, nous prenons la route du Sud.

La Turquie n’est plus qu’a quelques centaines de kilomètres.

Arrivés à Burgas, nous trouvons un bus de nuit, qui nous conduira a Istambul au petit matin. Nous prévenons nos amis qui font leur études là-bas, décidons d’un vague rendez-vous et partons visiter la ville de Burgas. En réalité, ce qui nous tardait le plus était de se baigner dans la Mer Noire.

À la tombée de la nuit, nous courrons nous jeter dans les vagues et revenons transis, ravis.

Le passage de la frontière s’avère, une fois encore, pittoresque. Reveillés à 2heures du mat’ par un chauffeur de bus, peu soucieux de savoir si nous étions entrain de faire de beaux rêves ou non… nous sommes jetés hors du bus à moitié nus, passeport à la main, sous une petite pluie vivifiante.

Les autorités désossent littéralement le bus.

Nous avons envie de leur dire que les personnes qu’ils recherchent (en ces temps là, plutôt les migrants syriens, auxquels Erdogan a déclaré la guerre) vont dans l’autre sens ! Ce n’est pas à l’entrée en Turquie qu’ils devraient être si consciencieux, mais plutôt à la sortie ! Bref, nous passons une heure dehors et réintégrons nos duvets jusqu’au petit matin.

5h du mat’, arrivée à Istambul !


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